03/02/2018 – Contre l’école du tri social, résistance

Lire aussi l'Écho des mobilisations du 2 février

Un document de Sud Éducation Paris qui met bien en lumière la logique des réformes du secondaire et de l’université.

Manifestation le 6/02 à 14h au RER Luxembourg

 

Source Sud Éducation 75

Réforme du lycée général et technologique

Le 24 janvier 2018, le rapport de la mission Mathiot sur le lycée général et technologique a été remis au gouvernement. Commandé par J.-M. Blanquer, ce rapport étroitement lié à la réforme de l’accès à la licence appelle à une refonte totale du lycée et du baccalauréat :
►Semestrialisation, démultiplication des filières et modularisation. Dès le deuxième semestre de seconde, les élèves devraient choisir en plus d’un tronc commun dit « Unité générale », des modules à la carte, appelés « Unité d’Approfondissement et de complément » comprenant majeure, mineure et mineure optionnelle, et se construire un parcours personnel de formation. Un temps « Unité d’Accompagnement » serait également consacrée à la préparation de l’orientation ou de travail en groupes.
►Le baccalauréat serait lui aussi réformé avec deux modalité de validation : des épreuves terminales au nombre limité et un contrôle continu sur les classes de Première et Terminale. Sans s’engager, le rédacteur du rapport laisse la porte ouverte au Ministère en proposant 3 modalités d’organisation d’un nouveau bac.

Cette réforme, si elle a lieu, c’est l’avènement de l’auto-entrepreneuriat et de l’individualisation ! Plus besoin de le démontrer, l’école est le premier lieu de reproduction des inégalités sociales. Avec cette individualisation des parcours, les déterminismes sociaux ne seront que renforcés : quand certain-es se retrouveront à faire des choix par défaut ou par goût, les élèves issus des classes les plus aisées et leurs familles choisiront les parcours les plus valorisés dans le modèle dominant. Ce projet est le pré-requis de la réforme de l’accès à l’université puisque le parcours des élèves est l’élément clé de la sélection via ParcourSup.

Les élèves seront chacun-e rendu-es toujours davantage responsables individuellement de leurs choix, de leurs parcours, de leurs « réussites » ou de leurs « échecs ». Les cadres collectifs de la construction de soi et sa force potentielle face à l’institution seront plus que mise à mal. L’élève deviendrait ainsi l’auto-entrepreneur de sa scolarité : c’est l’avènement du néo-libéralisme.

Côté personnels, pour les enseignant-es comme pour la vie scolaire, les conditions de travail vont être encore plus dégradées : l’organisation du temps de travail serait semestrialisée et les volumes horaires variables dans ce nouveau lycée où les matières et les options sont démultipliées et le cadre collectif dissout. Le rapport préconise également le passage pour tou-tes les élèves de Terminale d’un « Grand oral » devant un jury composé de deux enseignant-es et… d’une troisième personne dont le rédacteur omet de donner la qualité !

Enfin, P. Mathiot insiste : il faut une plus grande autonomie des établissements dans la répartition de la DHG et dans le choix de l’offre de formation ! On sait ce que cela veut dire : renforcement de la hiérarchie et concurrence entre les établissements et les disciplines.

Le gouvernement veut aller vite car cette réforme entrerait en vigueur dès la rentrée prochaine pour les classes de seconde avec une mise en œuvre du nouveau bac en 2020. Un projet de loi devrait voir le jour d’ici le printemps.

Pour Sud éducation Paris ces mesures vont à l’encontre du lycée polytechnique et égalitaire que nous défendons.

Régionalisation de l’orientation et de l’enseignement professionnel

L’association des régions de France (ARF) a publié en novembre 2017 une proposition de 18 réformes soumises au gouvernement pour renouveler l’enseignement professionnel et l’orientation scolaire. Leur constat : les LP et les CIO sont trop déconnectés du bassin local d’emploi, il faut donc « renforcer la cohérence de l’offre de formation sur les territoires ».
Création d’un Service Public Régional d’Orientation en y intégrant les professeur-es principaux/ales des LP ; développer l’apprentissage en fin de 3è et permettre aux jeunes de faire une première année en CFA sans contrat d’apprentissage ; transférer aux régions l’organisation de la voie professionnelle (lycée, BTS, licence pro) pour adapter l’offre de formation aux besoins des entreprises locales ; renforcer l’articulation lycée professionnel et entreprise par la valorisation de l’alternance et la présence de personnalités extérieures (c’est-à-dire des chef-fes d’entreprise) à la tête des CA…

C’est donc la perspective d’un enseignement professionnel sous le diktat des entreprises qui se dessine ! Cette vision à court terme suppose que l’enseignement professionnel serait là uniquement pour former (formater ?) de futurs salarié-es, adaptable au basin d’emploi local, créant ainsi une main d’œuvre soumise au bon vouloir des entreprises, déjà bien trop présentes dans le milieu de la formation professionnelle.
Pour les personnels, une régionalisation de l’enseignement professionnel et de l’orientation conduirait à un changement de statut, une territorialisation forcée et un avenir inquiétant.

Sud éducation Paris refuse que l’offre de formation dépende des besoins du MEDEF !

Sélection à l’université

Suite au « scandale » du système Admission Post-Bac l’année dernière, mais surtout pour tenter de surmonter les problèmes colossaux de moyens que rencontrent les universités avec les coupes budgétaires et la hausse du nombre d’inscriptions due à l’inflation démographique, et ce sans débloquer des financements à la hauteur des besoins, le gouvernement tente de faire appliquer un « Plan étudiant » à travers le projet de loi relatif à « l’orientation et à la réussite des étudiants ».

Ce plan instaure purement et simplement la sélection à l’entrée à l’Université ! Que prévoit-il ? Les lycéen-nes de Terminale doivent saisir 10 vœux non-hiérarchisés à travers l’application ParcourSup ouverte depuis quelques jours, vœux qui passeront ensuite à la moulinette d’un conseil de classe transformé en conseil d’orientation et de pré-sélection. Il va être demandé aux enseignant-es des lycées de rendre des avis sur chacun des choix des élèves. Conseil de classe à rallonge et surcharge de travail assurée en échange de la promesse d’une petite prime !

Ensuite, pour chaque filière universitaire, dont les capacités d’accueil ont été dictées par le rectorat, des « attendus » ont été rédigés. Là où les enseignant-es ont refusé de remonter des attendus locaux, c’est le cadrage national qui s’appliquera. Désormais l’accès à l’université en licence est conditionné à toute une série de critères (comme par exemple les notes sur les X dernières années, le niveau d’anglais, le comportement ou l’engagement associatif… et bientôt le choix de majeures/mineures dans le nouveau lycée). Les enseignant-es des universités devront à leur tour faire le tri et sélectionner les « meilleur-es ». Pour les rassurer quant à la charge de travail, le ministère de l’enseignement supérieur a annoncé la mise en place d’algorithmes locaux et opaques écartant automatiquement les dossiers les moins bien côtés, ce que, de son côté le rectorat de Paris fait semblant de nier.

Pour les élèves qui n’auront pas été accepté-es dans les filières qu’ils-elles ont choisi, ils-elles devront prendre les places restantes, à la discrétion du recteur de Paris.

Cette réforme est une remise en cause du libre accès à l’enseignement supérieur et instaure la concurrence entre tou-tes les élèves en individualisant les parcours, d’autant plus avec le projet de réforme du lycée. Le tri social est déjà à l’œuvre : les élèves des classes populaires, majoritairement orienté-es vers la voie professionnelle avaient peu accès à l’université mais, avec cette loi c’est l’exclusion totale des classes populaires de l’université qui se dessine.

Déjà mise en place, cette réforme n’est pourtant pas encore adoptée et l’heure est plus que jamais à la mobilisation !
Sud éducation Paris appelle à s’opposer au plan licence et à refuser la mise en place de la sélection.
Quelle école voulons-nous ?

Du Livret Scolaire Unique à la sélection à l’entrée à l’université, c’est le règne de la responsabilité individuelle !
Ces réformes et projets vont à l’encontre totale de l’école que nous voulons !
De la maternelle à l’Université, Sud éducation Paris revendique une école gratuite pour tou-tes avec les moyens nécessaires pour fonctionner, condition à l’égalité. Une école égalitaire qui ne trie pas, ni ne sélectionne, mais donne à chacun-e les moyens de comprendre le monde. Une école polytechnique qui mêle sans les hiérarchiser les apprentissages théoriques et pratiques et les disciplines, où chacun-e peut apprendre pour s’émanciper.

Sud éducation Paris appelle à la mobilisation :

Boycott des avis des conseils de classe de Terminale, refus de remonter les attendus et les avis dans les universités, assemblées générales, blocages des universités, grèves et manifestations.
Nous rejoindrons toutes les initiatives qui iront dans le sens de la convergence.
Pour une autre société, pour une autre école !

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